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« Noire n’est pas mon métier » : ce qu'elles disent un an après

Lors de sa sortie en mai dernier, cet ouvrage sur le racisme à l’encontre des actrices françaises noires avait fait le buzz. Un an après, les choses ont-elles changé ?  CINEWAX a rencontré Shirley Souagnon, Mata Gabin et Maimouna Gueye, trois actrices qui avaient partagé leurs témoignages dans le livre initié par Aïssa Maïga.

 

Face à ces trois actrices, on ne peut se dire qu’une chose : le cinéma et les arts du spectacle en France n’ont qu’à bien se tenir ! Car s’ils ne leur donnent pas une place, elles la prendront.

Cinewax : En 2000, lors de la cérémonie des César, le metteur en scène Luc Saint Eloy et Calixthe Beyala interpellaient sur scène l’industrie du cinéma français, pointant du doigt le manque de rôles alloués aux personnes noires. 20 après, rien n’a changé. Un an après la publication de “Noire n’est pas mon métier”  pensez vous que le livre a changé les choses ?

MATA GABIN  Si l’on regarde très précisément entre 1995, 2000 et aujourd’hui, il y a quand même une amélioration. Mais le changement est très lent et il n’est pas facile à déceler. Il reste plusieurs batailles. En tant que noir.e.s de France, il faut qu’on se fédère, que l’on devienne une force économique. C’est comme cela que l’on aura de plus en plus de poids. C’est peut être grâce à Luc Saint Eloy et son influence dans les années 2000 que les actrices ont eu plus de courage et de force pour s’imposer. Aïssa Maïga a initié son projet egalement car elle a été boostée par le documentaire d’Amandine Gay « Ouvrir la voix ». Chacun apporte une force à l’autre. On est en France, dans une Europe où nous  ne représentons que 3% de la population. Donc notre bataille est longue. Il ne faut pas baisser les bras et il est normal que le changement prenne un peu de temps.

Cinewax : D'après ce que vous dites, le chemin est loin d'être terminé. Il semblerait qu’en attendant, il faille tout faire soi-même, de la production à l’incarnation des rôles jusqu'à ce que les choses changent...

MAYMOUNA GUEYE : Je pense que cette notion d’attente, c’est à dire d’attendre qu’on nous donne un rôle, d’attendre qu’on nous produise ou que l’on nous donne de l’argent est très post-coloniale. Cette époque est révolue et c’est ce que le livre montre. Je préfère exister en ayant un engagement qui me soit propre et de ne pas être dans une position d’attente par rapport au cinéma et au théâtre français. Je ne suis pas dans une logique de couleur de peau, mais dans l'idée que l’on décide de me prendre car je correspond a un rôle en tant qu'être humain. Et je pense que peu à peu les choses vont changer si nous sortons de cette position d’attente et que nous commençons à être actrice de notre destin, oui.

Cinewax : Depuis le mouvement MeeToo, de plus en plus d’initiatives comme “Noire n’est pas mon métier” ou le mouvement 50/50 ont vu le jour et ont permis aux femmes de s’exprimer. Pensez vous que grâce à ces initiatives, la lutte pour la représentation des personnes racisées continuera de résonner ?

SHIRLEY SOUAGNON : Je pense que c’est pour cette raison qu’ Aïssa Maïga a décidé de rassembler nos témoignages. Nous sommes 16 femmes, 16 voix, et nous représentons tout d’un coup, à la fois le féminisme, le racisme, le sexisme… C’est un peu la convergence des luttes. Tous ces combats sont réunis dans ce livre.  Qui est plus à même que nous pour en parler finalement ? Nous payons nos impôts et notre redevance en France et nous aimerions faire partie du paysage culturel français. C’est normal. Dorénavant, les règles du jeu ont changé. Nous avons des pions pour jouer et nous sommes prêtes à continuer le combat.

 Chloé Ortolé - Rédactrice Cinewax 

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